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Note de synthèse

Mars 2000

La CNUCED X : Bilan et perspectives

Dans notre note du 3 février 2000, nous faisions état des travaux préparatoires de la Dixième Conférence de la CNUCED qui a eu lieu à Bangkok du 12 au 19 février 2000 ainsi que des principaux thèmes qui, selon toute vraisemblance, devaient y être discutés. La présente note entend faire un bilan "a posteriori" de la Conférence de Bangkok et en synthétiser les principales conclusions.

Introduction

Les nouvelles stratégies de développement

L'intégration de la société civile

Le rétablissement de la confiance dans le système

Les textes qui régiront les activités de la CNUCED dans les quatre ans à venir

a) La Déclaration de Bangkok

b) Le Plan d'action de la CNUCED

Conclusions

 

I. Introduction

1. La CNUCED X a réuni, une semaine durant, près de 2'500 délégués de 190 pays dans la capitale thaïlandaise. Les représentants de 120 ONG issues de près de 40 pays étaient également présents. De l'avis général, l'organisation thaïlandaise a été remarquable et, outre "l'entartage" du Directeur général sortant du FMI, aucun incident diplomatique ou protocolaire n'a été à relever. Mieux, la Conférence a marqué la "réconciliation officielle" entre MM. Moore et Supachai, les deux anciens rivaux dans la course à la direction de l'OMC. La sécurité des participants a été garantie à Bangkok et ce malgré de sérieuses menaces d'attentat sur la personne du Directeur général de l'OMC. Les manifestations de la société civile y ont été moins musclées que lors de la Conférence de Seattle et aucun débordement significatif n'a été à déplorer.

2. Sur le front des débats et des discussions, il convient de relever l'évidente "bonne volonté" des participants à la Conférence qui n'entendaient pas renouveler à Bangkok le fiasco de Seattle et qui sont dès lors parvenus à trouver un consensus sur tous les grands objectifs de la réunion.

3. Les buts avoués de cette dixième Conférence quadriennale de la CNUCED étaient au nombre de quatre:

· Discuter et élaborer de nouvelles stratégies de développement.

· Intégrer la société civile de façon plus active dans les discussions.

· Rétablir la confiance dans le système commercial multilatéral après la débâcle de Seattle.

· Adopter des documents de travail fixant le cadre des activités de la CNUCED pour les quatre années à venir.

II. Les nouvelles stratégies de développement

4. Des orateurs de haut niveau se sont exprimés à Bangkok sur le thème des nouvelles stratégies de développement à mettre en Suvre dans le contexte de la globalisation. Parmi les principaux, on relèvera le Secrétaire général de la CNUCED bien sûr, mais également celui des Nations Unies, les plus hauts responsables des institutions de Bretton Woods, de l'OIT et de la BID et plusieurs chefs d'Etat ou de gouvernement (note 1).

5. De façon générale, on peut dire que tant du point de vue des pays en développement que de celui des pays industrialisés, le processus de globalisation, à Bangkok, a fait l'objet d'une évaluation nettement plus mitigée que quatre ans plus tôt à Midrand lors de la CNUCED IX. De fait, si la globalisation était, en 1996 encore, porteuse de nombreux espoirs et appréhendée de façon plutôt positive, tous s'accordent aujourd'hui pour lui attribuer également beaucoup de peurs et d'appréhensions, singulièrement du point de vue des pays en développement. Le message clé de tous les intervenants a été celui de se demander ce qu'il convenait d'entreprendre pour faire de la globalisation un processus utile aux PED et non un mouvement les marginalisant plus encore sur la scène économique internationale. En ce sens, ils ont tous plaidé pour une meilleure prise en compte des revendications des PED/PMA tout en soulignant l'impérieuse nécessité de renforcer les structures globales de gestion de la mondialisation.

6. Plusieurs idées concrètes en faveur du développement ont été avancées. Parmi elles, nombreuses resurgissent de façon récurrente dans les divers forums traitant de développement. Mais quelques unes sont apparues à Bangkok pour la première fois. Parmi les plus marquantes:

· L'allégement de la dette pour les pays les plus endettés (récurrent).

· La promotion des investissements étrangers directs dans l'ensemble des PED (récurrent).

· Le renforcement du rôle des femmes dans la vie politique, économique et sociale des pays en développement (récurrent).

· Le rapprochement, de la part des pays industrialisés, de l'objectif fixé par les Nations Unies d'une aide publique au développement s'élevant à 0,7% du PIB, dont 0,2% en faveur des PMA (récurrent).

· L'amélioration de l'accès aux marchés pour les produits des PMA (récurrent); cf. infra ¤24/3.

· L'annulation pure et simple de la dette pour les pays les plus pauvres (récurrent).

· La réforme de "l'architecture financière internationale", idée nouvelle dans le cadre de la CNUCED en ce sens que jusqu'à présent, ce domaine ne relevait pas de sa compétence. Désormais, la CNUCED dispose d'un mandat pour mener des analyses sur les moyens à mettre en Suvre pour prévenir les crises financières; cf. infra ¤24/6.

· La création d'un Conseil de sécurité économique comprenant un nombre significatif de PED/PMA, idée nouvelle émise par le Directeur général du FMI.

· Le renforcement de la capacité technologique des pays en développement, notamment du point de vue de l'infrastructure physique et humaine nécessaire à leur intégration rapide dans la "nouvelle économie", idée nouvelle répondant à l'importance croissante que prend aujourd'hui le commerce électronique.

· L'impérieuse nécessité d'une plus grande cohérence et d'une meilleure coordination entre les grandes agences délivrant de l'assistance technique aux pays en développement dans le domaine commercial. Ce point a été relevé par rigoureusement tous les intervenants et toutes les délégations et fait explicitement référence aux dysfonctionnements pour le moins flagrants du projet de Cadre intégré (note 2).

Mais attention, il convient ici d'insister sur le fait que la traduction de ces idées en véritables stratégies de développement faisant l'objet de programmes concrets ne dépendra pas de la CNUCED elle-même mais bien plutôt des diverses instances internationales qui détiennent le pouvoir décisionnel et le mandat de les reprendre à leur compte: L'OMC pour les questions commerciales, le FMI pour les questions financières, le Club de Paris et le Club de Londres pour les questions de dette ou encore le G7 pour l'idée d'un Conseil de sécurité économique, etc.

 

III. L'intégration de la société civile

7. A titre de rappel (voir notre note de synthèse du 7 février 2000), mentionnons que la CNUCED entendait à Bangkok intégrer la société civile à ses débats par trois biais:

· Les cahiers d'espérance.

· La Réunion des parlementaires nationaux.

· L'Assemblée plénière des ONG.

8. Force est de constater que pour l'heure les cahiers d'espérance, sorte de tribune libre offerte aux citoyens de la planète pour y exprimer leurs idées en matière de développement, n'ont rien apporté de proprement transcendant. Leur publication et leur analyse approfondie n'interviendra toutefois pas avant la fin de l'an 2000.

9. De la réunion des parlementaires nationaux organisée sous l'égide de l'Union interparlementaire juste avant l'ouverture de la Conférence est issue une Déclaration finale de 7 pages (note 3) qui plaide surtout pour une plus grande participation des parlements nationaux à la définition des politiques de développement et en appelle à un suivi efficace des travaux de la CNUCED. A retenir également de cette Déclaration des parlementaires nationaux leur souci très clairement exprimé de préserver un environnement commercial international libre de barrières protectionnistes ainsi que leur préoccupation pour l'établissement et le respect dans tous les pays du globe de principes strictes de bonne gouvernance.

10. La réunion plénière des 120 ONG conviées à Bangkok, également tenue juste avant le début de la Conférence, a pour sa part produit un document "musclé" de 9 pages dans lequel transpirent toutes les rancSurs accumulées ces dernières années à l'encontre de la globalisation. Pour preuve cette simple phrase issue du troisième paragraphe du préambule: " [É] Nous sommes opposés à l'usurpation des fonctions des gouvernements nationaux et des droits démocratiques des citoyens par des institutions mondiales comme le FMI, la Banque mondiale et l'OMC ". De façon générale toutefois, on peut avancer qu'à l'instar de ce qu'affirme Martin Khor, Directeur de l'influente ONG Third World Network, l'utilité d'un système commercial multilatéral basé sur des règles clairement établies n'est pas véritablement remise en cause, même si lui et ses coreligionnaires en appellent à une réforme en profondeur de l'OMC par une plus grande transparence de ses processus décisionnels, par son ouverture accrue sur les revendications de la société civile et enfin par à une meilleure prise en compte des particularités des PED/PMA dans les accords commerciaux multilatéraux.

11. Par ces trois biais, la CNUCED a grandement joué le jeu de l'ouverture lors de sa dernière Conférence et cet état de fait est très largement à mettre au crédit de son Directeur général, M. Ricupero. Singulièrement à l'égard des ONG, la CNUCED a fait preuve d'une extrême transparence en leur offrant pour la première fois une véritable tribune. La CNUCED toutefois demeure un organisme strictement intergouvernemental dans lequel seule la position des Etats membres fait autorité et au sein duquel les ONG continuent de ne disposer que de strapontins. C'est pourquoi, dans le souci de renforcer la CNUCED dans son rôle de forum de discussions, il conviendrait désormais d'y clarifier le statut des ONG. En particulier, et sans aller jusqu'à leur incorporation pleine et entière dans l'institution, on ne saurait dans un premier temps qu'encourager la pratique de plus en plus répandue aujourd'hui consistant à intégrer officiellement dans les délégations nationales des représentants de la société civile tels des parlementaires, des experts ou des représentants d'ONG. Mais les gouvernements pourraient également, avant de déterminer leur position à la CNUCED, prendre l'habitude de procéder à de larges consultations auprès de leurs ONG nationales de façon à intégrer leurs positions en amont des rencontres intergouvernementales.

 

IV. Le rétablissement de la confiance dans le système

12. La crédibilité du système commercial multilatéral avait subi un sérieux revers à la suite de la Conférence de Seattle, tant auprès du public que parmi les diplomates. Première grande rencontre intergouvernementale après la dernière Conférence ministérielle de l'OMC, la CNUCED X se devait de montrer des signes encourageants dans le sens d'un rétablissement de la confiance dans les instruments multilatéraux régissant le commerce international.

13. Selon le Secrétaire général Ricupero, le système commercial multilatéral est de nouveau sur les rails ("back on track") et la confiance est retrouvée. On ne saurait toutefois faire preuve de trop d'optimisme à cet égard tant il est vrai que les sujets les plus controversés à Seattle n'ont été abordés que du bout des lèvres à Bangkok (dossier agricole, core labour standards, normes environnementales, rallonge des délais de mise en Suvre des accords, etc.). Du reste, cet aspect du rétablissement de la confiance n'a fait l'objet d'aucune discussion formelle ni d'aucun engagement concret dans les textes.

14. Si toutefois on voulait trouver des signes encourageants allant dans le sens d'une restauration de la confiance dans le système commercial multilatéral, on pourrait alors tout de même relever les trois suivants:

· D'abord des signes relevant du domaine "psychologique" et se révélant surtout dans le climat général des débats à Bangkok. Car il faut reconnaître, comme nous l'avons relevé plus haut, que les participants à la Conférence étaient de toute évidence bien disposés à obtenir un consensus. Il s'agira toutefois ici de voir si cet "esprit positif de Bangkok" demeurera dans le cadre des discussions techniques de Genève sur la mise en Suvre du Plan d'action de la CNUCED d'une part et sur les dossiers les plus controversés de l'OMC d'autre part.

· Ensuite, on peut relever le fait que malgré tous les griefs publiés à l'encontre de l'OMC depuis Seattle, aucune délégation à Bangkok n'en a appelé au démantèlement ou à la réduction du champ d'activité de l'organisation. Bien au contraire, toutes se sont clairement exprimées en faveur d'une plus grande participation de tous dans les activités de l'OMC ainsi que pour une accession rapide des Etats qui n'en sont pas encore membres. En ce sens, force est d'admettre que la confiance dans l'utilité du système demeure intacte.

· Enfin, il convient de mentionner les déclarations unanimes des pays industrialisés révélant leur ferme engagement de prendre sérieusement en compte les revendications des PVD/PMA à l'OMC. Certes il faut voir ici un effet de l'échec de Seattle dans lequel, comme on sait, les PVD ont joué un rôle. Mais ces déclarations se sont aussi accompagnées à Bangkok d'une réaffirmation de l'initiative visant à offrire aux produits des PMA un accès libre de tous droits de douane et de tous quotas (cf. infra ¤24/3).

15. A mettre également sur le compte des actions susceptibles de rétablir la confiance dans le système commercial multilatéral du point de vue des pays en développement, l'idée chère au Secrétaire général Ricupero selon laquelle la CNUCED devrait officier en tant que Syndicat des PED. De fait, l'activité déployée par la CNUCED dans la préparation de la Conférence de Seattle au titre de son Positive Agenda sera poursuivie et renforcée en ce sens que les PED y feront de plus en plus appel pour développer leur pouvoir de négociation dans le cadre d'un nouveau cycle de négociations commerciales à l'OMC.

16. S'il a bien été passablement discuté à Bangkok d'un nouveau cycle (qu'il soit dit du Millénaire ou du Développement), rien ne laisse présager toutefois de son lancement prochain. Si plusieurs délégations de pays industrialisés ont certes plaidé pour une reprise des négociations au plus vite, la délicate question - opposant tant les Etats Unis à l'UE que les PED aux pays industrialisés - des dossiers qu'elles devront englober n'a toutefois été abordée que de façon sibylline. Pour le Secrétaire général de l'OMC d'ailleurs, malgré l'émergence de signes encourageants observés récemment à Genève: "a new round of global trade talks is still a long way off " (AFP, 16 fév.).

 

V. Les textes qui régiront les activités de la CNUCED dans les quatre ans à venir

17. Sur le plan intergouvernemental, deux textes importants sont issus de la Conférence de Bangkok:

· La Déclaration de Bangkok: Pour un dialogue mondial et un engagement dynamique

· Le Plan d'action de la CNUCED

A) La Déclaration de Bangkok

18. La Déclaration de Bangkok est un texte politique et consensuel de portée générale. Elle tient en 13 paragraphes et est divisée en 3 parties intitulées:

· Le contexte

· Un nouveau départ

· Un dialogue ouvert et un plein engagement

19. Le contexte (¤1à4) dresse un bilan sommaire de la situation socio-économique dans le monde aujourd'hui. S'il y est bien reconnu que la globalisation a accru la prospérité et créé de nouvelles opportunités économiques dans certains pays, il y est également affirmé qu'elle comporte de gros dangers et engendre des difficultés. Plus spécifiquement: " [É] la mondialisation comporte un risque de marginalisation des pays, en particulier des pays les plus pauvres, et des groupes les plus vulnérables partout dans le monde " (¤2). Faisant référence à la crise asiatique qui avait frappé de plein fouet l'Etat hôte de la Conférence, le texte en appelle ensuite à l'établissement, au niveau international, de mécanismes préventifs dans les domaines du commerce, de l'investissement, de la concurrence et de la stabilité monétaire. Mais la dimension de la responsabilité individuelle de chaque Etat dans le déclenchement des crises n'est pas oubliée et le texte insiste sur la nécessité pour chaque pays de garantir " [É] de solides fondamentaux macroéconomiques, une meilleure gestion des affaires publiques, des taux d'épargne élevés, l'investissement dans les ressources humaines, l'exploitation durable des ressources naturelles, un vigoureux partenariat entre le secteur public et le secteur privé, et le dynamisme des exportations " (¤4).

20. Malgré son intitulé, Un nouveau départ (¤5à10) ne dit somme toutes rien de très nouveau et se contente (¤5) d'énoncer une longue liste de revendications récurrentes en faveur du développement (résoudre la question de la dette, améliorer les capacités de production des PVD, soutenir l'aide publique au développement, favoriser les investissements étrangers directs dans l'ensemble des PVD, etc.). Trois éléments toutefois y sont affirmés avec une attention toute particulière:

· La volonté de poursuivre un dialogue "ouvert et direct" sur la mondialisation "qui tienne compte des intérêts fondamentaux de tous" (¤6).

· La nécessité d'une plus grande "cohérence", entre les politiques nationales et les actions engagées par les organisations internationales d'une part, et entre les institutions multilatérales elles-mêmes d'autre part (¤7), cf. supra note n¡2.

· La difficulté pour les PMA d'être véritablement compétitifs sur les marchés d'exportation compte tenu de "l'intensification de la concurrence" (¤8). Dans cet esprit, le texte attire l'attention de la communauté internationale sur la 3ème Conférence des Nations Unies sur les PMA qui se tiendra à Bruxelles en 2001 en souhaitant que tous s'engagent pleinement pour son succès.

En outre, et en rapport direct avec les activités de l'OMC, le texte insiste (¤9et10) sur les six points suivants à propos desquels "il demeure urgent de réaliser sans tarder des progrès" (¤10 in fine):

· Revoir le mécanisme de prise de décisions au sein de l'OMC de façon à le rendre plus transparent, équitable et démocratique.

· Améliorer l'accès aux marchés pour les produits des PED/PMA.

· Régler les questions de mise en Suvre des accords de l'OMC.

· Améliorer (qualitativement et quantitativement) le Traitement spécial et différencié (y compris l'assistance technique).

· Favoriser l'accession à l'OMC des pays qui n'en sont pas encore membres.

· Insister pour que tout nouveau cycle de négociations commerciales soit placé sous le signe du développement.

21. La partie intitulée Un dialogue ouvert et un plein engagement (¤11à13) constitue enfin la part de la Déclaration de Bangkok qui est consacrée au rôle de la CNUCED elle-même. Ainsi y est-il réaffirmé qu'elle doit poursuivre son rôle de forum visant à intégrer la dimension du développement au commerce international. Mention y est faite également à l'inclusion nécessaire dans les débats de la société civile (¤12 in fine). Enfin quant au Plan d'action de la CNUCED, les Etats membres estiment y avoir inclus un ensemble de solutions pratiques susceptibles de "[É] créer un système économique mondial plus juste et meilleur" (¤13), qu'il s'agit désormais de mettre en Suvre efficacement.

B) Le Plan d'action de la CNUCED

22. Le Plan d'action de la CNUCED, large document de 46 pages et 171 paragraphes, constitue le texte de valeur "constitutionnelle" énonçant le mandat sur la base duquel sera élaboré le Programme de travail de l'organisation jusqu'à sa prochaine Conférence dans quatre ans. Bien que formellement divisé en 2 chapitres, le Plan d'action est organisé en 3 parties distinctes:

· Chapitre I, lettres A&B (¤1à35): fait une évaluation générale des effets de la mondialisation sur les pays en développement (lettre A) ainsi que des résultats des "grandes initiatives internationales" en faveur du développement (lettre B). C'est donc une partie essentiellement descriptive et déclarative.

· Chapitre I, lettre C (¤36à102): énonce les actions qui pourraient / devraient être entreprises par la communauté internationale pour tâcher de remédier à la situation décrite dans la première partie. Ceci est abordé sous trois grands angles: celui des investissements, celui du commerce et celui des "autres questions liées au développement".

· Chapitre II (¤103à171): donne textuellement mandat à la CNUCED d'entreprendre des programmes opérationnels dans les domaines relevés au Chapitre I. C'est donc la partie clé du texte et celle qui constitue effectivement le "plan d'action" de la CNUCED.

23. De façon générale, et avant que d'examiner plus en détail certaines de ses dispositions les plus originales, il convient de retenir les cinq points suivants à propos du Plan d'action:

· Le rôle de la CNUCED y est réaffirmé de façon très claire comme le sont ses axes traditionnels d'activité (¤103à105). La CNUCED compte ainsi cinq domaines d'expertise, tous orienté sur le développement, et qui correspondent à l'organisation interne du Secrétariat (¤105):

1. Globalisation, interdépendance et développement

2. Investissements, entreprises et technologie

3. Commerce international

4. Efficacité commerciale, services et infrastructure, développement des ressources humaines

5. Pays le moins avancés.

· Et l'activité de la CNUCED dans ces cinq domaines répond à trois approches (¤104):

1. Le "consensus building", autrement dit, le rôle de la CNUCED en tant que forum de discussion et d'échange d'expériences.

2. Le rôle de recherche et d'analyse, de façon à fournir des contributions scientifiques de fond aux discussions intergouvernementales (note 4).

3. L'assistance technique délivrée par la CNUCED aux PED/PMA, autrement dit les programmes opérationnels qu'elle met sur pied dans ses domaines d'expertise et dont il est précisé à maints endroits dans le Plan d'action qu'elle devrait se faire "[É] en collaboration et en coordination avec d'autres organisations compétentes" (¤104/3).

· Le Plan d'action est un texte très largement consensuel en ce sens que tous les participants présents à Bangkok en sont globalement satisfaits. Pour preuve, le fait qu'à l'ouverture de la Conférence, seuls 15 éléments du projet de texte devaient encore être discutés par les Ministres tandis qu'il y a quatre ans à Midrand, le projet de Plan d'action contenait non moins de 650 parenthèses. A l'avenir, il s'agira toutefois d'observer, dans les discussions techniques de la CNUCED sur la mise en Suvre des programmes opérationnels, si ce large consensus demeurera, notamment lorsque les questions de financement seront soulevées.

· Partout, dans le texte du Plan d'action, est mis l'accent sur les préoccupations et les revendications des PED/PMA quant à leur intégration dans le processus de globalisation et plus spécifiquement dans le système commercial multilatéral géré par l'OMC. Ceci tient grandement au fait que, dans l'historique des négociations qui ont abouties au Plan d'action, le Groupe 77 se soit montré particulièrement actif en proposant avant tout autre groupe de pays un projet de texte dont la lecture enseigne qu'une large majorité des dispositions qu'il contenait ont été maintenues dans la version définitive du Plan d'action.

· Globalement, le Plan d'action accorde une place très large à l'activité de la CNUCED dans le domaine du commerce international. Beaucoup plus large d'ailleurs que dans le précédent Plan d'action arrêté à Midrand en 1996 (note 5). De fait, un rapide calcul nous montre qu'un bon quart des paragraphes du texte de Bangkok se rapporte au domaine commercial et vise directement les activités de l'OMC.

· Enfin, il est à relever que le Plan d'action contient plusieurs dispositions tout à fait nouvelles pour la CNUCED (voir ci-après).

24. Dans un ordre progressif, il est judicieux de relever les paragraphes suivants dans la lecture du dernier Plan d'action de la CNUCED:

· Le ¤7 est un de ceux qui ont été les plus discutés à Bangkok et affirme que: "La démocratie, la primauté du droit, une gestion administrative transparente et responsable, y compris la lutte contre la corruption [É] et son élimination, constituent les fondements indispensables d'un développement durable à visage humain". Ainsi, bien qu'il n'ait pas été accordé à la CNUCED le mandat d'effectuer des études spécifiques sur la corruption, il a été admis dans le ¤109/4 que la dimension de la bonne gouvernance serait désormais incluse dans les divers travaux d'analyse de l'organisation, ce qui constitue une nouveauté non négligeable.

· Le ¤24, s'inscrivant dans la partie consacrée aux PMA, vient contrebalancer quelque peu l'esprit général du texte qui se veut très conciliant envers les revendications des PED/PMA. Ainsi y trouve-t-on une liste sans concession de huit "observations" formulées par les pays industrialisés à l'encontre des politiques nationales mises en place par les PMA. Parmi ces huit éléments, on retiendra par exemple, l'absence de cadre juridique et institutionnel propice à l'initiative privée, les insuffisances de la politique macroéconomique ou encore les graves conséquences socioéconomiques de conflits locaux ou régionaux dans un certain nombre de PMA.

· Le ¤58, s'inscrit dans le cadre des diverses dispositions du texte visant à améliorer l'accès aux marchés des pays industrialisés pour les produits en provenance des PMA. Ainsi y est-il réaffirmé l'urgente nécessité que les pays développés accordent "l'accès à leurs marchés en franchise et hors contingentement pour la plupart des exportations des PMA". Cette initiative devra maintenant être concrétisée dans le cadre des Accords de l'OMC, mais en la réaffirmant clairement, la CNUCED joue ici pleinement son rôle d'impulsion des idées en tant que "syndicat" des PED/PMA.

· Le ¤59, toujours en rapport avec l'OMC, réaffirme la nécessité de "faciliter le processus d'adhésion" à l'OMC des PED et des PMA qui n'en sont pas encore membres mais ceci "en tenant compte du niveau de développement des pays ainsi que des principes fondamentaux de traitement spécial et différencié".

· Les ¤100-101 mettent pour la première fois dans un Plan d'action de la CNUCED aussi clairement l'accent sur le développement et la mise en valeur des ressources humaines des pays en développement dans la perspective des entreprises privées. Il y est par exemple largement fait mention à la dimension humaine nécessaire à l'adaptation des PED/PMA aux Nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) dont dépend la nouvelle économie.

· Le ¤107 est également une nouveauté pour la CNUCED en ce sens qu'il l'investit désormais du mandat d'intégrer la dimension du développement dans le débat sur la réforme de l'architecture financière internationale, notamment dans le but de la rendre plus apte à prévenir les crises dont les effets systémiques sur les PED ne sont plus à démontrer depuis quelques années.

· Le ¤110/2 risque de susciter passablement de discussions à l'avenir, et singulièrement sa dernière phrase qui stipule: " [É] le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies est invité à établir un nouveau sous-programme relatif à l'Afrique ". Car en l'état, ceci aurait pour conséquence de créer une nouvelle structure dans le cadre de la CNUCED, contrairement à ce à quoi les Etats membres s'étaient engagés à Midrand. Des interprétations divergentes sur ce bout de texte risquent dès lors de survenir dans la phase de mise en Suvre du Plan d'action.

· Les ¤129 à 147 constituent le large mandat d'analyse et d'assistance qui est désormais donné à la CNUCED en rapport à tous les dossiers traités par l'OMC, y compris les aspects de propriété intellectuelle au travers de l'accord sur les ADPIC. Plus spécifiquement, la CNUCED devra, dans ses analyses, mettre l'accent sur les moyens à mettre en Suvre pour: encourager la diversification de la production dans les PED/PMA; lier la libéralisation du commerce à la promotion des transferts de technologies; et réviser les dispositions du Traitement spécial et différencié de façon à les rendre plus utiles aux PED/PMA.

· Les ¤146-147 ont trait à la problématique "commerce et environnement" et stipulent que la CNUCED, en collaboration avec l'OMPI et l'OMS, devra promouvoir de l'analyse et du conseil sur les moyens de favoriser le transfert de technologies "propres" et respectueuses de l'environnement en direction des pays en développement. La CNUCED se voit en outre autorisée à effectuer une recherche sur les implications et les effets des biotechnologies sur le plan commercial, environnemental ainsi qu'en regard de la biodiversité.

· Le ¤148 recèle également un nouveau mandat pour la CNUCED puisqu'elle sera désormais autorisée à fournir de l'assistance technique et de l'analyse à ses Etats membres dans le domaine du tourisme.

· Le ¤149/1 reconnaît pour la première fois dans un Plan d'action le potentiel de développement que peut représenter le commerce électronique pour les PED/PMA et autorise la CNUCED à effectuer un travail d'analyse et d'assistance en la matière.

· Le ¤158 est consacré au programme de la CNUCED relatif aux pôles commerciaux (Trade Points) et apporte son soutien à la stratégie du Secrétariat visant, dans un délais de trois ans, à réaliser le réseau des pôles commerciaux puis à le sortir du cadre de la CNUCED pour le confier à un organisme à but non lucratif. Cette stratégie du Secrétariat de la CNUCED répond en partie à l'évaluation pour le moins négative dont avait fait l'objet le programme des pôles commerciaux en octobre 1998 (note 6).

· Les ¤164 à 169 sont entièrement consacrés à l'assistance technique. De façon générale, cette section insiste sur la nécessité d'augmenter l'efficacité et la transparence de l'assistance technique fournie par la CNUCED. Cette dernière devrait être axée sur trois domaines prioritaires (¤164/ii): aider les PED/PMA à s'intégrer dans l'économie mondiale en compatibilité avec leurs exigences de développement; les assister dans les négociations commerciales multilatérales ainsi que dans l'application de leurs résultats; et promouvoir la coopération entre pays en développement. Mais il y est aussi réaffirmé (¤164/viii) l'engagement pris à Midrand de parvenir dans les plus brefs délais à un autofinancement de certains programmes (note 7) comme à une participation financière des pays bénéficiaires des programmes d'assistance technique.

· Le ¤166 visait à l'origine à créer un nouveau programme d'assistance technique de la CNUCED dans le domaine du renforcement des capacités (capacity building) des hauts fonctionnaires issus des PED/PMA - notamment dans le domaine des new economic issues - au travers de la mise en place d'un centre de formation. Dans sa version définitive, aucune nouvelle structure ne sera finalement créée ni aucun fonds nouveau débloqué, même si un renforcement des programmes de la CNUCED en la matière demeure crucial du point de vue des PED/PMA.

· Le ¤171 enfin, adopté à l'initiative des pays industrialisés, insiste sur la nécessité, dans la mise en Suvre de l'ensemble des dispositions arrêtées dans le Chapitre II du Plan d'action, de mettre en place des instruments de contrôle inspirés du new public management en budgétisant de façon rigoureuse les programmes et en en fixant clairement les objectifs de façon à les rendre plus efficaces.

 

VI. Conclusion

25. Au terme de la Conférence de Bangkok tous les participants étaient globalement satisfaits. Le Plan d'action, texte clé de la CNUCED X, est un document équilibré et consensuel, bien que fort touffu et fixant de nombreux mandats à l'organisation pour les quatre ans à venir. Le Secrétariat de la CNUCED considère la Conférence de Bangkok comme une pleine réussite et les PED/PMA peuvent se targuer d'y avoir obtenu gain de cause sur l'essentiel de leurs revendications. Quant aux pays industrialisés et donateurs de fonds dans le cadre de l'assistance technique, ils ont également réussi à faire adopter par les Etats membres de la CNUCED l'essentiel de leur préoccupations, notamment en matière de bonne gouvernance et de contrôle financier des programmes opérationnels. Il appartient désormais à ces trois groupes d'acteurs (CNUCED, PED/PMA et pays industrialisés) de faire perdurer l'esprit constructif des discussions de Bangkok jusqu'en 2004 de façon à donner une véritable chance au développement de l'ensemble des pays et des individus de la planète.

 

 

Note 1 : C'est peut être ici le lieu de préciser que les pays industrialisés n'ont, dans leur ensemble, pas envoyé de hauts représentants politiques à Bangkok puisque seul le Premier Ministre japonais a fait le déplacement de la CNUCED X. (retour texte)

Note 2 : Le Cadre Intégré (Integrated Framework) est le projet qui fut lancé à la suite du Plan d'Action en faveur des PED issu de la Seconde Conférence ministérielle de l'OMC en 1996 et a pour objectif de travailler avec les 48 PMA pour coordonner les programmes d'assistance technique en matière commerciale de 6 organisations: FMI, CCI, CNUCED, PNUD, Banque mondiale et OMC. Près de deux ans et demi après son lancement en octobre 1997, l'évaluation du programme se doit d'être pour le moins mitigée. D'une part il a été difficile d'obtenir de la part des PMA - comme le prévoyait le projet - des évaluations (need assessments) précises et concrètes quant à leurs besoins prioritaires d'assistance en matière commerciale. Mais en plus les 6 agences n'ont, jusqu'à présent, pas fait preuve d'une réelle bonne volonté de coopérer efficacement (voir à ce propos http://www.ldcs.org). (retour texte)

Note 3 : Tous les documents dont il est fait mention dans la présente Note de synthèse se trouvent dans leur version française et en libre accès sur le site Internet de la CNUCED consacré à la conférence de Bangkok à l'adresse URL suivante: http://www.unctad-10.org/index_fr.htm. (retour texte)

Note 4 : Outre de nombreuses études ponctuelles sur divers domaines liés au développement, la CNUCED produit chaque année trois rapports importants: Le Trade and Development Report (TDR), Le World Investment Report et le Least Developed Countries Report. (retour texte)

Note 5 : Il est à relever toutefois les natures quelque peu différentes des deux Plans d'action en ce sens que celui de Midrand avait essentiellement pour objectif la réforme institutionnelle de la CNUCED tandis que celui de Bangkok aborde plus directement la question du contenu de ses activités. (retour texte)

Note 6 : Voir à ce propos: CNUCED, 05 octobre 1998, In-Depth Evaluation of UNCTAD's Trade Points Programme, prepared by an independent evaluation team: PriceWaterhouseCoopers, Ms. Nathalie Floras, Mr. Alejandro Rogers, TD/B/WP/110. (retour texte)

Note 7 : Les programmes SYDONIA (gestion informatisée des douanes), SYGADE (gestion et analyse de la dette) et SIAM (gestion informatisée des transports de marchandises), in ¤164/viii. (retour texte)

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